Pour la Journée de cohésion de l'armée, le ministre de la Défense n'a pas hésité à faire appel à la vice-championne du monde des 100 et 200 mètres de Londres.
Ce qui s'est passé vendredi dans une des grandes casernes d'Abidjan montre combien les mutineries ont traumatisé et les populations et les autorités ivoiriennes. En effet, pour une Journée de cohésion de l'armée ivoirienne, le ministre de la Défense a sorti, si l'on peut dire, l'artillerie lourde en la personne de Marie-Josée Ta Lou, la sprinteuse ivoirenne récemment vice-championne du monde des 100 et 200 mètres. Hamed Bakayoko a organisé et médiatisé l'invitation qui a été faite à la grande sportive. Objectif confié à l'AFP par un membre du ministère : « Donner un exemple aux soldats des résultats que l'on peut obtenir avec du travail et de la discipline. »
Pour rappel, en janvier puis en mai, d'anciens rebelles intégrés dans l'armée se sont révoltés et ont fini par obtenir de l'État 12 millions de francs CFA (18 000 euros) pour chacun des 8 400 d'entre eux. Cette crise, qui a encore eu des répliques en juillet, a ébranlé le pays, dont l'image de stabilité retrouvée a été atteinte. Elle a aussi considérablement fragilisé l'équipe gouvernementale et le président Alassane Ouattara, qui a nommé un de ses proches, M. Bakayoko, ancien ministre de l'Intérieur, à la Défense fin juillet.
Pour Ta Lou, « un plaisir d'être là »
La sprinteuse a présidé l'échauffement d'un millier de soldats à l'état-major des armées puis assisté au lever du drapeau, avant de lancer le départ du footing. « Je ne sais pas s'il y a des problèmes c'est vous qui me l'apprenez », a répondu diplomatiquement Marie-Josée Ta Lou à l'AFP, préférant souligner les similitudes entre l'armée et le sport de haut niveau : « On fait tout avec détermination, avec courage et cœur. Ce sont les mêmes vertus : courage, abnégation, don de soi. Quand je sors de Côte d'Ivoire, je représente le pays et tout le peuple ivoirien [...] pour me dépasser encore plus. » Et de poursuivre : « C'est un plaisir [d'être là] parce que l'armée représente le pays, veille sur nous et fait en sorte que nous soyons en sécurité. Je prie pour que cette armée continue à veiller sur nous et puisse être en bonne santé », a ajouté la sprinteuse. Ce à quoi un soldat a réagi en disant : « C'est sympa de la voir. On est content. Ça nous motive. » Interrogé sur la vitesse de la sprinteuse frêle et de petite taille, un autre soldat a répondu : « Plus forte que nous ? Pas possible, nous on est commando parachutiste ! »
Ta Lou, désormais un symbole de la Côte d'Ivoire qui gagne
Quatrième du 100 et 200 mètres aux Jeux olympiques de Rio, battue d'un cheveu pour l'or sur 100 mètres, Ta Lou a pris deux médailles d'argent aux Mondiaux de Londres. « Après les larmes de Rio, c'était la joie à Londres », a-t-elle confié. Accueillie en grande pompe à la présidence ivoirienne en fin de matinée, Ta Lou, qui a accroché ses deux médailles autour du cou du président Alassane Ouattara lors de la cérémonie, s'est vu décerner une prime de 40 millions de francs CFA (60 000 euros) pour son exploit, alors que son entraîneur a reçu vingt millions.