Éléphants : Le problème d’avant-centre, le grand défi de Patrice Beaumelle

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Éléphants : Le problème d’avant-centre, le grand défi de Patrice Beaumelle

Éléphants : Le problème d’avant-centre, le grand défi de Patrice Beaumelle

Après la gestion du cas Gervinho et l’attribution du brassard, Tchétché Aimé, Consultant Sportif et ancien joueur de la sélection Ivoirienne, nous donne la suite de sa chronique baptisé ‘‘Patrice Beaumelle, 5 clés pour réussir sa mission’’ avec comme point notoire l’épineuse question du poste d’avant-centre.


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3-/ Trouver une solution au poste d’avant-centre

 

L’une des lacunes actuelles de l’équipe nationale de Côte d’Ivoire, c’est l’absence d’un avant-centre qui soit au niveau des attentes. Depuis la retraite de Didier Drogba et la méforme de Wilfried Bony après le sacre de la CAN 2015, aucun joueur n’arrive à s’imposer et à rassurer à ce poste. Le problème est d’autant plus criard que la sélection ivoirienne n’y a été que rarement confrontée dans son histoire.

 

Cette génération n’est pas vernie, serait-on tenté de dire. Car, à chaque cycle de leur histoire, les Eléphants ont toujours été conduits par de grands, voire exceptionnels, avant-centres. Même avant l’indépendance en 1960, la Côte d’Ivoire avait de très talentueux attaquants de pointe. On se souvient de l’incroyable Jean Tokpa. Surnommé « la Perle noire », « le Sorcier » ou encore « le Magnifique », il a été le chef de file de la première vague des professionnels ivoiriens en France dans les années 50. Le Racing Club de France l’a acheté à prix d’or en 1959 : 26 millions de francs français, transfert record à l’époque.

 

Comment ne pas évoquer Ignace Wognin, la légende de l’Asec Mimosas ? Pur produit des Jaune et Noir, il a la réputation d’être l’attaquant ivoirien le plus prolifique du championnat français (D1 et D2), avec 101 buts de 1956 à 1959. Que dire de l’incroyable Sékou Touré qui reste dans les annales du football comme le seul footballeur ivoirien meilleur buteur du championnat de France, avec 25 buts en 36 matches avec Montpellier, lors de la saison 1961-1962 ? Avant cela, ce redoutable attaquant, parti de l’Asec Mimosas pour l’Africa Sports, a remporté la Coupe de l’AOF avec les Vert et Rouge en 1958 après une mémorable victoire devant les Mimos (5-0).

 

Dans les années 60, Eustache Manglé « le Lion » a été un digne héritier de cette race de grands avant-centres ivoiriens. Pour le premier match de l’histoire des Eléphants à la CAN, il a signé un triplé devant le Congo-Léopoldville (actuel RD Congo). C’était en 1965, en Tunisie. Il a terminé meilleur buteur de cette CAN.

 

A côté de lui, à l’Asec Mimosas, il y avait un certain Konan Yoboué dit « Pelé ». C’était un redoutable buteur. Lors de la CAN 1965, face au Sénégal, c’est lui qui est l’auteur de l’unique réalisation qui a permis aux Eléphants de décrocher la médaille de bronze pour leur première participation à la compétition.

 

On peut également évoquer le légendaire Joseph Bléziri, auteur du but victorieux qui a permis au Stade d’Abidjan de remporter la Coupe d’Afrique des clubs champions en 1966, face au Réal de Bamako de Salif Kéita « Domingo ». Professionnel en France, l’Africa Sports l’a appelé en renfort en 1968 pour tomber la grande équipe du TP Englebert (actuel TP Mazembé), en coupe d’Afrique des clubs champions. Mais les Aiglons ont été disqualifiés sur tapis vert.

 

Toujours au Stade d’Abidjan, il y avait le mythique Déhi Maurice, auteur d’un doublé lors de cette fameuse finale de la Coupe d’Afrique des clubs champions en 1966, au stade Félix Houphouët-Boigny. Avec les Eléphants, il a participé à la CAN en 1965 et 1968.

Dans cette vague des années 60, le plus grand de tous, et même à ce jour de mon point de vue, demeure Laurent Pokou « l’Homme d’Asmara ». Jusqu’en 2008, il était meilleur buteur de l’histoire de la CAN avec 14 réalisations, avant d’être détrôné par Samuel Eto’O. Toutefois, il conserve le record du nombre de buts marqués en une seule rencontre avec un quintuplé face à l’Ethiopie lors de la CAN 1970.

 

A suivi dans les années 70, la génération incarnée par Kobina Kouman « l’homme au pied gauche meurtrier » et Gbizié Léon au jeu de tête dévastateur.

 

Puis, dans les années 80 se sont révélés l’incroyable Abdoulaye Traoré « Ben Badi », véritable machine à buts, et Joël Tiéhi « Jakys » dont le jeu en fixation est sans doute l’un des plus purs de l’histoire du football ivoirien. Ces deux joueurs conduisaient l’attaque des Eléphants lors du sacre de Sénégal 92.

 

Les remarquables Hamed Ouattara « Pelé » et Ibrahima Bakayoko ont assuré la transition dans les années 90 début 2000, avant que ne démarre l’ère Didier Drogba en 2002. Celui-ci reste le meilleur buteur de tous les temps des Eléphants.

 

A la retraite internationale de Drogba en 2014, Wilfried Bony et Doumbia Seydou ont pris la relève pour participer activement au second sacre de 2015 en Guinée Equatoriale. Depuis lors, avec la méforme et sans doute le manque de motivation de ces deux joueurs, c’est la galère à la pointe de l’attaque ivoirienne.

 

Ce « bref » historique (oui, car il y a d’autres que nous n’avons pas cités) nous a semblé nécessaire pour que les uns et les autres se rendent compte de la véritable carence des Eléphants actuels au poste d’avant-centre.

 

Celui qui a semblé perpétuer la tradition est Jonathan Kodjia alias « Jimmy danger ». A mon avis, il a le physique de l’emploi. Mais, freiné par des blessures, sa discrétion dans les grands matches et surtout sa maladresse à la CAN 2019 le desservent.

 

Pourtant, la qualité première d’un avant-centre, c’est de concrétiser toutes les occasions de but de son équipe. C’est lui le finisseur. Il peut pour cela s’aider de sa force physique, de son jeu de tête, de sa qualité de dribble, de sa puissance de frappe, de son sens du placement, de sa vitesse et même de sa roublardise dans la surface de réparation. Au finish, ce qu’on attend de lui, c’est de marquer des buts. Ce joueur-là fait défaut à la génération actuelle des Eléphants.

 

Outre Jonathan Kodjia qui était son préféré, l’ex-sélectionneur Kamara Ibrahim a eu à essayer une kyrielle de jeunes : Gohi Bi Cyriac, Méité Yakou, Yohan Boli, Togui Mel, Bayo Vakoun, Arnaud Aké Loba. Le résultat est mitigé. Il a même tenté de « ressusciter » Wilfried Bony sans succès.

 

Le poste d’avant-centre est incontestablement le talon d’Achille des Eléphants. C’est sans doute le plus gros défi technique que Patrice Beaumelle est appelé à relever. C’est l’une des clés de réussite de sa mission.

 

Ma proposition est de mettre Jonathan Kodjia en confiance. Le maintenir dans le doute, comme je le constate actuellement, est une erreur. J’insiste : il a le physique de l’emploi. Il faut seulement qu’il retrouve son efficacité devant les buts. A notre époque, l’astuce de nos entraîneurs était de nous mettre en amical face à des adversaires largement à notre portée. On les battait 7-0 ou 8-0. On n’en tirait pas une gloire particulière, mais l’objectif était atteint : retrouver la confiance.

 

Dans ce sens, je pense que le transfert de Kodjia au Qatar est une bonne chose. Ce n’est pas un handicap pour son retour en sélection. Loin s’en faut. Il a les qualités et l’âge (30 ans) de la maturité à ce poste d’avant-centre. S’il est mis en confiance, il pourrait tirer un jeune prometteur comme Christian Kouamé. Sans pour autant écarter ceux que j’ai cités.

La quatrième clé de réussite avec les Eléphants pour Patrice Beaumelle consistera à prendre au moins quatre points face à Madagascar.

 

4-/ Prendre au moins quatre points face à Madagascar

 

Patrice Beaumelle a signé un contrat d’un an avec la Fédération Ivoirienne de Football (FIF). Sa mission principale est de qualifier les Eléphants pour la CAN 2021, au Cameroun.

La tâche est loin d’être aisée car, mathématiquement la sélection ivoirienne n’est pas bien logée. Après les deux premières journées, la Côte d’Ivoire est troisième au classement de la poule K, avec 3 points, après une victoire étriquée face au Niger (1-0) à domicile et une défaite amère en Ethiopie (1-2). Au regard de la règle de la primauté des confrontations directes en cas d’égalité, les Walyas (3 points) sont seconds derrière Madagascar qui a fait le plein en deux sorties (2 victoires, 6 points).

 

Lors des 3è et 4è journées, les Eléphants auront une double confrontation très importante contre les Baréa. Les Ivoiriens recevront d’abord au stade Félix Houphouët-Boigny, avant de se déplacer, quelques jours plus tard, en terre malgache pour le retour. 

 

Pour conserver ses chances de se qualifier, la Côte d’Ivoire se devra de remporter au moins quatre points lors de ces deux matches face à Madagascar. L’idéal serait de l’emporter à Abidjan pour s’éviter toute pression, avant de négocier un bon résultat à Antananarivo.

En cas de victoire à domicile, les Eléphants auraient le même nombre de points (6) que les Baréa, mais ils passeraient devant leur adversaire à la différence particulière. Ils se mettraient alors en bonne position pour la qualification et devront négocier au moins un point en terre malgache pour conserver cette position. Les Ivoiriens auront alors une meilleure visibilité avant d’aller au Niger (5è journée) et finir le travail à Abidjan devant l’Ethiopie (6è journée).

 

Si la Côte d’Ivoire ne parvient pas à prendre au moins quatre points contre Madagascar, il est clair qu’elle se mettrait en difficulté. Elle courrait le risque non seulement de voir l’Ethiopie prendre le large, mais aussi d’être en position défavorable à la différence particulière vis-à-vis de la sélection malgache. Dans ce cas de figure, les Eléphants pourraient ne plus avoir leur destin entre leurs mains.

 

Une élimination de la CAN 2021 serait le plus gros échec du football ivoirien depuis dix-huit ans. Patrice Beaumelle a intérêt à ne pas endosser une si triste performance, dans sa jeune carrière de sélectionneur.

 

Pour s’éloigner de cette perspective et écarter tous les doutes à son sujet, le mieux pour le technicien français serait de tout mettre en œuvre pour prendre au moins quatre points face à Madagascar. S’il réussissait cela, il se mettrait dans un environnement favorable pour la suite de sa mission.

 

Alors, il ne lui resterait plus que la dernière clé de la réussite de sa mission avec les Eléphants, la cinquième : faire preuve de caractère.

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Sportivement

Aimé Tchétché

 

Le caractère dont doit faire preuve le technicien Français sera à l’honneur de la 5è et dernière clé de Tchétché Aimé.

  

Aimé Tchétché

D'où provient l'info

  • Source : MondialSport.ci
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  • Dernière mise à jour : Mer, 01 Avr 2020 à 15h 07
  • Contacter l'auteur : news@mondialsport.net

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