Attendue depuis le 24 décembre dernier, l’identité des membres du comité de normalisation de la FIF est connue depuis le jeudi 14 janvier 2021. Sénatrice de la République de Côte d’Ivoire, Mme Mariam Dao Gabala a été choisi pour présider ledit comité épaulé dans sa mission par le Professeur Martin Bléou et Me Adou Simon Abé. Inconnu du monde sportif, la financière de formation est revenu sur sa rencontre avec les émissaires de ma FIFA et comment elle comptait mener à bien les missions qui lui ont été assignées. C’était au cours d’un entretien accordé à l’émérite journaliste Ivoirien Fernand Dédeh.
Madame Mariam Dao Gabala, vous présidente du comité de normalisation de la fédération ivoirienne de football. On ne vous connaît pas un passé de sportive, on ne vous connaît pas dans le milieu du football. Quel est votre sentiment ?
D’abord, un sentiment de reconnaissance. Parce que ma modeste personne n’est pas connue dans le milieu du sport et du football. Donc, avoir pensé à moi, m’avoir proposée pour diriger le comité de normalisation, je pense que c’est un privilège. Et puis, je vois ma nomination comme une mission. Une mission citoyenne. C’est vrai que je ne suis pas actrice dans le milieu du football et du sport. Mais le sport a une très grande importance en Côte d’Ivoire. Une importance par rapport à l’image du pays, une importance par rapport à la cohésion. Le football est aujourd’hui, un élément d’unité. Le football, quelque soit votre religion, quelque soit votre appartenance, quelque soit votre bord, que vous soyez homme ou femme, jeunes ou vieux, vous pouvez vous retrouver, vous embrassez, vous pouvez vibrer autour d’un même idéal. Donc, apporter sa contribution à redorer son blason de ce sport, je pense que c’est une mission citoyenne qui nous a été confiée. Et présider ce comité de normalisation, c’est une mission, c’est vrai difficile, mais pas impossible à mon avis. Je pense que je suis habituée à des missions difficiles même si ce n’est pas dans le milieu du Sport. Chacun va apporter sa contribution.
On ne vous connaît pas vraiment dans le milieu du Sport. En quelques mots, présentez-vous aux Ivoiriens...
Je suis Mariam DAO Gabala, je suis Sénatrice de la République de Côte d’Ivoire. J’ai beaucoup travaillé dans le monde des entreprises, dans le financement des entreprises. Je suis financier de formation. J’aime dire que je suis une mère de cinq (5) garçons. Donc, vous imaginez, quand c’est jour de football à la maison... Je ne suis pas si éloignée du foot quand même, car je vibre avec mes garçons. Aujourd’hui, j’ai un cabinet de consultance, ou j’essaie de coacher et de développer les talents des jeunes entrepreneurs. Mon expérience professionnelle, c’est peut-être elle qui a parlé pour moi. J’ai beaucoup participé aux redressements d’entreprises. D’abord, des institutions africaines, dans huit (8) pays depuis les années 90, donc, vous imaginez... L’Etat m’a demandé aussi, il y a quelques années, de présider le comité de redressement de l’UNACOOPECI, la COOPEC qui est la plus grande institution de microfinance de ce pays. Et puis, au plan international, j’ai été emmenée à gérer un certain nombre de transitions, des transitions de management. J’ai été aussi Administrateur de banque pendant 20 ans. Je suis Administrateur de sociétés. Mais je pense que ce sont mes actions à la société civile qui parlent pour moi. Parce que dans la société civile, je suis reconnue comme une activiste des Droits de l’homme et plus particulièrement, des Droits de la femme. Depuis quatre (4) ans, j’ai dirigé deux Think-Tank sur l’Afrique. Un, qui s’appelle « New Africa Leaders » parce que ce continent doit être reconstruit sur de nouvelles valeurs et un deuxième qui s’appelle « Stand up Africa » qui a pour vision de voir l’Afrique comme le leader de l’humanité à l’horizon 2025. Je travaille beaucoup au niveau de la société civile. Je suis reconnue comme une activiste des Droits de la femme. À ce niveau, je forme beaucoup de femmes qui veulent s’engager en politique...
Une femme dans un milieu d’hommes. Est-ce que vous pouvez réussir ?
Je compte sur la volonté de tout un chacun pour réussir ma mission. Je pense qu’une femme, dans un milieu d’hommes, elle apporte son sens de l’écoute, ce qui est très important, elle apporte aussi son sens de l’équité dans tout ce qui est fait. Je pense que devant les hommes, on a une relation différente. Vous savez, les hommes entre eux, ont tout de suite, une relation de pouvoir. Avec les femmes, on adoucit, on prend le temps de s’écouter. On prend le temps du consensus, on prend le temps d’avancer ensemble. C’est peut-être ce sens-là, de la cohésion, de l’écoute, du rassemblement que je peux apporter dans le milieu du football.
On me dit « mais, vous n’êtes pas connue dans le milieu du football ». Je pense que pour une mission telle que celle-là, ne pas être du milieu, est un atout. Parce que, on prend du recul, on devient plus objectif devant les problèmes et on les analyse simplement. Déjà, je suis heureuse que ce soit des Ivoiriens qui cherchent une solution à des problèmes ivoiriens. C’est un pas. Le fait de ne pas être du milieu permet de prendre du recul. Je note qu’aucun des membres du comité de normalisation n’est un habitué du cercle du sport. Je pense que cela nous permet de prendre le recul nécessaire, d’aborder les choses telles qu’elles sont et d’apporter, en toute indépendance, des propositions.
Madame, quelles sont les péripéties de votre nomination par la FIFA à la tête du comité de normalisation ?
Je souris parce que ce matin, quand je me réveillais, je ne pensais pas que j’allais être présidente d’un comité de normalisation. J’étais loin de l’idée que j’allais être dans le football. J’ai reçu un coup de téléphone vers 11 h de M. Veron, le délégué de la FIFA. Il me dit : « Madame, nous sommes venus spécialement de Suisse pour vous rencontrer. Est-ce qu’on peut se voir aujourd’hui parce que nous devons repartir ce soir ». Je dis Ok. Et on se donne rendez-vous à l’hôtel Ivoire à 16 h30. Évidemment, quand il m’a dit la FIFA, je me suis dit « La FIFA, c’est le monde du football. Je ne suis pas trop foot. ». J’ai dit à mon fils, « quels sont les développements dans le milieu du foot ? » Je savais qu’il y avait déjà des problèmes au niveau de la FIF mais je ne suivais pas vraiment au quotidien. Donc, je vais le rencontrer. Il me dit « Madame, nous sommes venus pour vous proposer de prendre la tête du comité de normalisation. ». C’était une surprise pour moi. C’est une mission d’ampleur mais c’est une mission citoyenne. Je pense que chacun de nous en ressortira grandi si le football et la FIF sont remis sur pied.
Je me rappelle simplement que mon enfance a été bercée par les championnats. Et que nos enfants aujourd’hui n’aient pas cette ferveur autour du championnat et qu’ils soient plutôt liés aux championnats européens, ça donne à réfléchir.
Il y a comité de normalisation parce qu’il y avait une grosse crise à la fédération. Vous avez suivi cette crise de votre position. Vous êtes aujourd’hui dans la position « Soldat du foot » dans un milieu divisé, avec les différents clans qui se regardent en chiens de faïence...
C’est une mission difficile. Vous savez, juste après ma nomination, on me disait « tu risques de rentrer dans la boue. ». La première réponse que j’ai donnée, « je vais porter des bottes. Nous allons porter des bottes. ». Ce n’est pas parce qu’il y a la boue, qu’il ne faut pas aller à l’assainissement. Nous allons porter des bottes. Je pense que c’est une mission pour laquelle nous sommes prêts. Parce que le plus important, c’est la Côte d’Ivoire. Et le plus important, c’est le foot. Si le foot va bien, les Ivoiriens iront bien. Donc, même si elle est difficile, on se sacrifiera pour elle.
Quel est votre état d’esprit là maintenant ? À quoi pensez-vous tout de suite ? Par quoi comptez-vous commencer ?
Je suis dans l’esprit d’aller au charbon. Mettre la main à la pâte. Je suis dans un esprit totalement positif. Je pense que c’est difficile que l’on nous demande d’y aller. Tant que nous avons le soutien des Ivoiriens et que nous avons le soutien de la FIFA, il faut y aller. Il faut bien que quelqu’un accepte de rentrer et d’essayer d’apporter sa pierre au relèvement du football en Côte d’Ivoire. Nous sommes prêts pour le faire. Je sais que ce n’est pas facile. Mais c’est un défi. Aussi grand que soit le défi, il faut qu’il trouve une solution.
Si vous aviez un message à passer aux acteurs du football, le tout premier, aujourd’hui...
Je dirai que c’est ensemble que nous réussirons. Il faut penser à la Côte d’Ivoire. Il faut penser à ce que le foot est pour les Ivoiriens. C’est ensemble que nous réussirons la mission. Ce n’est pas une mission de deux ou trois personnes. Si nous avons tous la volonté de sortir le foot de la situation actuelle, nous réussirons. Mais il faut avoir une vision. Pas une vision personnelle. Mais une vision pour la Côte d’Ivoire. Et pour la Côte d’Ivoire, il faut que chacun s’engage. Le pays nous appelle pour relever un défi.
Propos recueillis par Fernand Dédeh