Après l’élection agitée à la Fédération Ivoirienne de Football (FIF) qui a conduit à la mise sous normalisation de l’instance par la FIFA, ou plus récemment celle au Taekwondo (FITKD) boycottée par d’illustres grands Maîtres sous prétexte qu’elle était biaisée, c’est autour du Sport Equestre de confirmer le triste constat : ‘‘Fédération Sportive’’ et ‘‘Elections’’ font 2 sous nos tropiques.
Réélu le vendredi 19 novembre dernier pour un second mandat de 4 ans à la tête Fédération Ivoirienne d’Equitation (FIE), Stéphane Ouégnin semble ne pas faire l’unanimité. Et pour cause, les circonstances de sa réélection et le collège électoral laissent songeur…
C’est en effet à l’Espace Crystal, en Zone 3 C (propriété de la famille Ouégnin) et en présence d’Allah Kouamé, représentant le Comité national Olympique (CNO) et Djako Emile ministère de la Promotion des Sports et du Développement de l’Economie Sportive que Stéphane Ouégnin, seul candidat à sa succession, a été reconduit pour 4 ans par seulement 4 clubs dont le sien (Jaipur Club) sur une vingtaine. Poney club, Freies Pferd et Altaïr sont les 3 autres clubs qui ont pris part à cette élection.
Les reproches des dissidents
Si le lieu de l’élection pose tout naturellement un problème d’éthique, l’absence de concurrents et le nombre très restreint de votants, quoique plausible, interrogent et témoignent du malaise au sein de cette fédération, comme dans tant d’autres. Un malaise qui a fait naître un collectif de clubs dissidents qui s’est montré très actif ses dernières semaines pour dénoncer ce qu’il considère comme insuffisances dans la gestion du bureau en place. Selon ce collectif qui revendique 12 clubs dont celui de Moumouni Lonfo, fils de l’un des premiers importateurs du cheval en Côte d'Ivoire et candidat déclaré d’alors à l’élection, les 4 clubs votants ont été triés sur le volet par Stéphane Ouegnin. Les clubs Freis-Pferd et Altaïr seraient une pure invention du président.
« Aucune personne dans le milieu du sport équestre en Côte d'Ivoire n'en a jamais entendu parler. Ils sortent de nulle part juste pour que Ouégnin se maintienne au pouvoir contre la volonté de ceux qu'il disait être venu aider »,
soutenait-il avant l’élection.
Moumouni Lonfo
Le collectif reprochait également la hausse du montant fixé pour l’affiliation (25 000 à 350 000 Fr CFA) sous le mandat de Stéphane Ouégnin. Une barrière financière qui, ajouté au manque de compétition, a vite fait de mettre bon nombre de clubs sous l’éteignoir.
« Lorsque le président sortant de la FIE a été élu en 2017, la cotisation par club était de 25 000 Fr par an. L’année suivante, elle est passée à 150 000 Fr. Aujourd’hui, nous sommes à 350 000 Fr par an. Il n’y aucune activité. Il n’y a aucune compétition organisée en Côte d’Ivoire. Tous les jeunes cavaliers qui vivent de l’activité du cheval, sont laissés pour compte. Si nous devons les accompagner, nous devons être des modèles. Ces jeunes ont faim. Aujourd’hui, nous pouvons dire que par la grâce de Dieu, on arrive à manger. Si nous donnons de la voix, c’est surtout parce que nous pensons à nos jeunes frères qui vivent du métier de cheval »,
déclarait Valentin N'gom, président de l’Ecurie N’gom et membre du collectif le 11 novembre dernier à la presse.
Alors qu’ils souhaitaient profiter de l’élection pour dégager leur ‘‘bourreau’’ par la voix des urnes, les dissidents se sont vus refuser le droit de vote suite à des dispositions dans les statuts dont ils affirment ne pas avoir été associés à leur adoption.
« La Fédération nous a dit qu’on doit 1 050 000 Fr par club (retard de cotisation ndlr). Nous avons donc appelé un membre de la Fédération, lui expliquant que nous sommes là pour payer nos cotisations. Ce dernier nous a dit que ce n’est pas à une semaine des élections que vous allez payer vos cotisations. Attendez le prochain bureau fédéral. Nous n’avons pas participé à l’adoption de ces nouveaux textes. Nous n’avons pas signé ces documents (…) »
Comme si cela ne suffisait pas, Moumouni Lonfo, candidat du collectif, s’est vu refuser le droit de compétir pour le scrutin du 19 novembre dernier. De quoi accentuer la division entre les deux camps.
La part de vérité de l'équipe dirigeante
Face à ces nombreuses plaintes, Stéphane Ouégnin et son équipe ont tenu à livrer leur part de vérité. Concernant le droit de vote, Cheick Bamba, secrétaire général, a souligné que tout se fait conformément aux textes que les membres eux-mêmes se sont donné depuis 2018.
« On ne peut pas accepter que des membres qui ont refusé de s’acquitter de leurs devoirs puissent venir brusquement, à la veille des élections, pour chercher à payer leur ré-affiliation. Ce sont des choses qu’aucune association sérieuse ne peut accepter. Depuis le 31 octobre, nous avons clôturé nos comptes... Alors, nous leur avons demandé de patienter juste une semaine, le temps que la Fédération renouvelle ses instances pour reprendre leur place »,
a-t-il expliqué face à la presse.
Concernant la candidature de Moumouni Lonfo, là encore, les textes ont été respectés selon le SG.
« Quand vous êtes membre d’une association, vous devez connaître son fonctionnement, les textes qui régissent cette association. M. Moumouni Lonfo a attendu la dernière minute pour déposer son dossier... Il nous reproche de ne lui avoir pas dit ce qu’il devait faire. Pour une candidature sérieuse, il fallait qu’il se rapproche de l’instance, et puis tout a été communiqué selon nos textes, par voie de presse, affiches, courriers et par nos canaux habituels. »
Quid du collège électoral ?
« Chaque club affilié a reçu en tout 1 300 000 Fr CFA de la fédération pour résister face à la pandémie à COVID 19. Au lieu de nous reprocher de na pas aider les clubs, ils devraient commencer par prendre dans cet argent pour payer leur affiliation, mais ils ont préféré le garder. Ce sont ces quatre clubs (les votants ndlr) qui remplissent tous les critiques du scrutin notamment avec au moins 10 chevaux, 10 box et sont à jour de leurs cotisations »
a précisé Paul Seiller, vice-président chargé des clubs.
Si dans chaque camp les arguments se valent, toujours est-il que la famille du sport équestre ivoirien reste divisée à ce jour. Réélu, le président Stéphane Ouégnin a néanmoins jeté les bases d’une réconciliation avec ses pairs.
« Le cheval est notre passion commune. Œuvrons ensemble pour son épanouissement, mais dans la rigueur et le respect des textes que nous nous sommes donnés. En tout cas, je lance un appel à tous nos frères et sœurs qui, à un moment donné se sont sentis frustrés de revenir. Il y a de la place pour tous ; il faut surtout qu’on se parle pour briser les murs de l’incompréhension. Mon rôle premier est de fédérer. Je vous prends à témoin. Ma main sera tendue. On ne peut obliger quelqu’un à venir contre son gré. En ce qui me concerne, ils seront tous les bienvenus »,
déclarait-il au soir de sa réélection le 19 novembre dernier. Discours de façade ou réelle volonté de ramener l’union dans la famille ? L’avenir nous le dira.
Stéphane Ouégnin, Président de la Fédération Ivoirienne d'Equitation (FIE)