Lauréat du titre de meilleur entraîneur de l’année lors de la cérémonie des CAF Awards, le technicien Ivoirien s’est prononcé sur ses modèles dans le milieu mais aussi d’autres sujets.
Vainqueur de la Coupe d’Afrique des Nations avec les Eléphants de Côte d’Ivoire, Faé Emerse a été désigné entraîneur de l’année lors de la cérémonie des CAF Awards le 16 décembre dernier. L’ancien milieu de terrain du FC Nantes s’est confié au micro de nos confrères du magazine Onze Mondial.
Le technicien de 40 ans dit s’inspirer actuellement du coach de l’Olympique de Marseille.
«Actuellement, j’apprécie particulièrement ce que fait Roberto de Zerbi, le coach de Brighton. Après, il y a les classiques, Carlo Ancelotti, Jürgen Klopp, Pep Guardiola… Mais De Zerbi a ce truc en plus. Il a un jeu comme j’aime, ambitieux, porté sur la possession, sur l’attaque. C’est un jeu où l’on prend des risques, je me retrouve dans sa philosophie. On joue pour marquer. On prend le temps de préparer nos actions, mais avec du monde dans la zone de finition. Je pousse mes latéraux à participer offensivement, car je demande toujours à un milieu de rester en soutien pour les défenseurs. J’aime bien le jeu porté vers l’avant. J’aime avoir la possession pour bien préparer et épuiser l’adversaire.»
Interrogé sur les entraîneurs Africain, le natif de Nantes a été clair.
«Avant, ce qui était important pour les dirigeants africains, c’était de prendre des entraîneurs européens, souvent français, car il y a beaucoup de pays francophones. Ils étaient rassurés, ils avaient peut-être plus de notions tactiques, mais depuis quelques années, vu que les formations sont universelles, on prépare les entraîneurs de la même manière en Afrique qu’en Europe. C’est pour ça que l’on fait plus confiance aux coachs africains. Avec le temps, la tendance va s’accentuer. On ne change pas les choses du jour au lendemain, ça vient petit à petit. Dans les années à venir, les pays africains, à l’image du Maroc en 2022, seront plus nombreux à faire de gros parcours dans les grandes compétitions. À partir de là, les entraîneurs africains seront regardés différemment.»
Le sélectionneur dit aimer le schéma tactique en 4-3-3 avec notamment une sentinelle.
«J’aime bien jouer en 4-3-3 avec une sentinelle et deux 8. Il y a un système que j’aime de plus en plus, c’est avec trois défenseurs centraux, là encore avec trois milieux : une sentinelle et deux 8. Ensuite, forcément les pistons, et deux attaquants. Ce système est le plus équilibré, car tu as toujours tes trois sécurités avec les trois défenseurs centraux. En plus, si tu arrives à combiner avec tes deux attaquants qui ont des profils différents, un qui prend la profondeur, l’autre en pivot, et des pistons purs… ça peut vraiment faire mal, mais il faut qu’il soit maîtrisé. Après, j’ai l’habitude du 4-3-3, un système plus classique.»
Concernant son attitude dans les vestiaires, Faé Emerse a fait savoir qu’il s’adapte.
«Ça dépend. Avant le match, quand on arrive au stade, je suis plus du style à laisser les joueurs dans leur préparation, car chaque joueur à sa préparation. Je les laisse se motiver entre eux, se parler entre eux. Je vais plutôt faire ma grosse discussion la veille, à l’entraînement, et sur ma causerie avant d’aller au stade. Ensuite, j’essaie de ne pas les déranger, même si ça peut m’arriver de donner une dernière consigne, si j’ai un flash-back ou si l’équipe adverse nous surprend par sa composition. Ce sont des ajustements.»
Il a aussi évoqué son tout premier discours quand il a pris les commandes de l’encadrement technique des Eléphants.
«Ça a été simple. Ça faisait deux jours qu'on avait la tête dans le guidon après cette défaite 4-0 contre la Guinée équatoriale. On a passé deux jours où on ne savait pas si on était qualifiés. Mon premier discours, le jeudi matin, quand on sait qu’on est qualifiés et qu’on va jouer le Sénégal, c’est : on est ensemble. On est 27 joueurs, on a le staff technique, médical, la communication, les anciens qui ont aussi aidé. On est entre nous. Avec cette délégation, on va le faire ensemble. Il faut retrouver ce groupe compact et soudé. Disons-nous les choses comme des adultes et travaillons ensemble sans tenir compte de tout ce qui se dit et se passe à l’extérieur. Je savais qu’on était capables de gagner la CAN, mais on avait plus de chance de ne pas y arriver. En fait, en être capable, avoir les joueurs pour gagner, je savais que c’était le cas. On était équipés pour gagner. Le football, tu peux parfois tout bien préparer et ne pas gagner, même si tu fais tout bien. Il y a une incertitude, toujours.»
Sur les egos des joueurs, le meilleur entraineur Africain a pris l’exemple de Franck Kessié.
«Il y a des egos quand il y a de grands joueurs, c’est normal. Quand j’enlève Franck Kessié sur le huitième de finale, son ego est touché. Mais j’étais très bien entouré, mon staff technique et médical, les anciens de 2006, qui parlaient beaucoup avec les joueurs. Parfois, je n’étais même pas au courant. J’ai un intendant, JC, qui est très proche des joueurs, il parle beaucoup avec eux. Il leur faisait comprendre que mes décisions n’étaient pas contre eux, mais pour le groupe. Que de toute façon, si un joueur n’est pas aligné, je vais avoir besoin de lui, car il va devoir faire la différence en entrant. La gestion des egos s’est bien passée, car les joueurs ont réagi au message. Tout le monde a fait un boulot énorme.»
Faé Emerse est également conscient qu’il faut énormément de chances dans le football à l’image de la dernière CAN.
«La chance, il faut parfois compter dessus. En poule, contre la Guinée équatoriale, on perd 4-0, mais c’est presque contre le cours du jeu. On met deux buts refusés, la VAR a un problème, l’arbitre ne va pas voir la vidéo. Les buts sont refusés après les célébrations. On prend des coups sur la tête à chaque fois qu’on égalise, mais que le but est refusé. En huitième, la chance est passée de notre côté. En quart contre le Mali, on est à 10 contre 11, on prend un but à 20 minutes de la fin, on égalise à la 90ème grâce à un joueur qui vient de rentrer, on marque à la 120ème par un joueur qui vient aussi de rentrer. Tu te dis que la réussite est de notre côté. Après, franchement, le fait de ne rien lâcher du début à la fin… la chance, tu vas la chercher, elle ne te tombe pas dessus par hasard. On est allés la chercher. On sait qu’on a eu de la chance sur le match du Mali. Mais sincèrement, tout le monde a fait les efforts.»
Le technicien se dit motiver à relever des nouveaux défis.
«Au contraire ! J’adore le challenge, c’est super excitant. En deux semaines, tu as fait un truc de malade. Et tu sais que pour les prochaines années, les gens vont t’attendre pour la confirmation. Le plus dur, c’est de confirmer. C’est ça qui me motive et me donne envie de montrer que ce n’était pas un coup de chance, qu’on est capable de reproduire cela sur le long terme»,
a-t-il déclaré.