L'ancien capitaine des Éléphants de Côte d'Ivoire était l'invité du ‘‘SALON DES ACTIONNAIRES’’, l’une des émissions phares de radio RJN, pour évoquer sa belle et riche carrière de footballeur en trois articulations : Itinéraire, Souvenirs et Actualité.
Né le 14 décembre 1980, à Abidjan, ZOKORA Déguy Alain Didier dit Maestro, est un ancien défenseur central, puis milieu de terrain international ivoirien formé à l’Académie MimoSifcom. Il a évolué dans plusieurs grands clubs européens en Belgique (KRC Genk), en France (AS Saint-Étienne), en Angleterre (Tottenham Hotspur), en Espagne (FC Séville), en Turquie (Trabzonspor, puis Akhisar Belediyespor), ensuite en Inde dans les clubs de FC Pune City, puis de North East United et enfin en Indonésie à Semen Pandang.
Découvrez les confiances du 119è invité du ‘‘SALON DES ACTIONNAIRES’’.
Itinéraire
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La rencontre qui a changé sa vie
Je commencerai par parler de Sol Béni, le lieu où j’ai grandi et où j’ai donné une orientation définitive à ma vie. Sol Béni constitue pour moi une belle histoire, celle de ma jeunesse, de ma vie et de mon parcours. Je suis né à Adjamé. Mais j’ai grandi à Yopougon. Je suis issu d’une famille modeste. J’ai eu la chance de faire la connaissance d’une personne qui est très spéciale pour moi. C’est le Coach Jean-Marc GUILLOU. Il se rendait dans tous les quartiers des différentes communes d’Abidjan pour dénicher des talents purs. Je jouais dans une équipe de quartier, à Yopougon, appelée Zoman avec laquelle j’ai participé un jour à des tests de recrutements à Sol Béni. Et j’ai été retenu pour faire partie des premiers élèves de ce qui allait devenir l’Académie MimoSifcom, le prestigieux centre de formation de l’ASEC Mimosas.
De la galère au confort
C’était en 1994. J’avais à peine 13 ans. Se maintenir à l’Académie MimoSifcom a été très difficile. Mais je me suis accroché à cette belle occasion que j’avais eue pour me faire une place dans le groupe. J’y ai vécu avec d’autres gamins que je ne connaissais pas auparavant, mais avec lesquels nous avons fini par former une vraie famille sportive et nourrir un projet et un objectif communs : devenir de grands footballeurs internationaux ivoiriens et marquer notre génération. Au départ et pendant 3 ans, nous nous rendions à Sol Béni les matins à 9h00, du lundi au vendredi et nous rentrions chez nous en fin de journée, à 19h00. C’est après que le Président du Conseil d’Administration de l’ASEC Mimosas, Me Roger OUÉGNIN, avec le soutien du Groupe SIFCOM, a fait construire des dortoirs et des salles de classe pour que nous vivions à l’internat à Sol Béni.
Pour presque tous, enfants issus de familles modestes dans des conditions difficiles pour certains, cela a changé notre mode de vie à travers les chambres climatisées dans lesquelles nous dormions désormais, l’alimentation, la formation intellectuelle et culturelle, les sorties détentes à la mer et les Tournées internationales en Europe. On nous apprenait à écouter Beethoven, Mozart, à bien parler le français, l’anglais, l’espagnol pour que nous nous adaptions plus tard à toutes les situations d’une carrière de footballeurs professionnels.
Le décès de son frère
Après, mon frère cadet ZOKORA Armand dit Armando m’avait rejoint à l’Académie MimoSifcom. Malheureusement, il est décédé par noyade à 15 ans lors d’une sortie au bord de la mer, à Grand-Bassam, quelques jours avant la Super Coupe d’Afrique des clubs. Et cela m’avait perturbé. Mais il a fallu me réarmer moralement pour avancer.
Le Super Coupe d’Afrique des Clubs remportée face au Géant Tunisien
Le dimanche 7 février 1999, il y a eu ce grand match de la Super Coupe d’Afrique des Clubs face à l’Espérance Sportive de Tunis qui venait de remporter la Coupe des vainqueurs de Coupe 1998 de la CAF. Nous venions à peine de finir notre formation. Seuls le Président Roger OUÉGNIN et le Coach Jean-Marc GUILLOU avaient foi en nous. L’équipe de l’Espérance de Tunis s’entraînait à Sol Béni. Et quand ses joueurs nous voyaient et qu’on leur disait que c’est nous qui allions les affronter, ils s’étonnaient et refusaient de le croire en disant : « C’est une plaisanterie. L’ASEC ne fera jamais jouer ces gamins contre nous. C’est impossible ».
Et pourtant, c’est ce qui s’est passé et c’est ce match qui nous révélera au monde entier après notre victoire (3-1) face à cette grande équipe de l’Espérance Sportive de Tunis. Des semaines plus tard, un numéro du documentaire « Envoyé spécial » de France 2 montrant notre parcours de gamins s’entraînant les pieds nus à Sol Béni jusqu’à cette finale historique de la Super Coupe a fait de nous de véritables chouchous du public sportif en Côte d’Ivoire et dans le monde entier.
La conquête de l’Europe
Après notre première saison en équipe professionnelle de l’ASEC Mimosas, en 1999, j’ai été le premier jeune joueur de la première promotion de l’Académie MimoSifcom (Promotion Johan) à être transféré dans un club européen, précisément au KRC Genk, en Belgique. Aruna DINDANÉ a suivi en posant ses valises à Anderlecht, toujours dans le même pays. De Genk, je suis parti pour la France, à l’AS Saint-Étienne où j’ai passé 2 saisons merveilleuses avant d’évoluer à Tottenham Hotspur, en Angleterre; au FC Séville, en Espagne; à Trabzonspor, puis à Akhisar Belediyespor, en Turquie; ensuite au FC Pune City, puis à North East United, en Inde et enfin à Semen Pandang, en Indonésie. C’est dans ce dernier pays que j’ai mis fin à ma carrière de footballeur. Les qualités qui m’ont permis de réussir un tel parcours sont le sens du devoir, la volonté, l’esprit collectif sur un terrain, l’amour et la passion du football.
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Souvenirs
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Les mauvais
Je parlerai d’abord de mes mauvais, puis de mes pires souvenirs avant d’évoquer les meilleurs. Les mauvais sont le fait de ne pas avoir remporté le titre de Champion de Côte d’Ivoire avec l’équipe première de l’ASEC Mimosas durant la seule saison que j’ai passée au sein de celle-ci, en 1999. Il y a ensuite notre rêve brisé lors des éliminatoires des Jeux Olympiques Sydney 2000 (Australie) et le fait qu’après 20 ans en équipe nationale, 5 phases finales de la CAN et deux finales perdues (2006 face à l'Egypte & 2012 face à la Zambie), je n’ai jamais remporté cette compétition.
Les pires
Mes pires souvenirs sont les décès de mon petit-frère ZOKORA Armand dit Armando qui était promis à une brillante carrière de footballeur lorsque nous étions encore à l’Académie MimoSifcom, puis de mon père qui était mon mentor quand j’évoluais au FC Séville en Espagne. La mort d’Armando m’avait fait très mal, mais en même temps cela m’avait donné la force de jouer chaque match à fond et réussir une belle carrière. Chaque fois que je me trouvais sur un terrain, je m’entraînais et je jouais pour nous deux, car notre rêve, lui et moi, était d’évoluer au haut niveau comme les frères KALOU (Bonaventure et Salomon) et TOURÉ (Kolo et Yaya).
Le meilleur pour la fin
Mon meilleur souvenir est la finale de la Super Coupe d’Afrique des Clubs que nous avons remportée en février 1999. Le stade FHB était quasiment vide au début du match. Après 20 minutes de jeu, j’ai remarqué que les tribunes étaient devenues noires de monde. Tous ceux qui regardaient le match en direct à la télévision se sont rendus au stade FHB pour vivre le beau football qui nous a permis de battre la grande équipe de l’Espérance Sportive de Tunis (3-1) après prolongation.
Résumé de la Supercoupe CAF 1999
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Actualité
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À la fin de ma carrière de footballeur professionnel, je suis rentré à Abidjan. Je reste toujours un passionné de football, mais j’ai d’autres activités auxquelles je me consacre et dont je ne veux pas parler. Je garde de bonnes relations avec les dirigeants de l’ASEC Mimosas, mon club formateur. Chaque semaine, je me rends à Sol Béni pour échanger avec mes anciens coéquipiers Baky KONÉ (actuel Président de la Section Football), N’DRI Koffi Romaric (Entraîneur de l’Équipe Réserve) et BEUGRÉ Ahiba Hermann dit Patceco (Entraîneur des U14 de l’Académie MimoSifcom).
Pour terminer, je dirai que j’ai beaucoup appris de mes erreurs. La grande leçon que j’ai retenue de la vie est celle-ci : l’amour du prochain est le meilleur sentiment qui peut faire le bonheur de l’humanité. Alors je souhaite que tous les Ivoiriens nourrissent ce sentiment pour vivre dans l’union et la paix pour le bonheur de notre pays.