Max Gradel : ‘‘J’étais prêt à mourir pour le foot’’

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Max Gradel : ‘‘J’étais prêt à mourir pour le foot’’

Max Gradel : ‘‘J’étais prêt à mourir pour le foot’’

Dans une interview accordée au média français "Le Parisien" en décembre 2018, le Capitaine du Toulouse Football Club (TFC) évoquait plusieurs sujets au nombre desquels son enfance difficile avec son père qui s'opposait à la pratique de sa passion. Allons-y pour une séance rattrapage !


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Vous portez le brassard de capitaine depuis cet été. Cela change quelque chose pour vous ?

 

Pas vraiment. Dans tous les clubs où je suis passé, j'ai eu des responsabilités sur le terrain et en dehors et, jamais je ne me suis défilé. Parler pour parler, ça ne sert à rien. Il faut prendre la parole au moment opportun. Un capitaine doit d'abord être exemplaire dans les actes.

 

Vous partagez, notamment avec Neymar, ce souci prononcé pour la prise de risque. Vous avez conscience que vous pouvez parfois agacer ?

 

Dans une équipe, le rôle de certains est de créer. On nous paye pour ça. On est là pour tenter, pour oser des choses compliquées ou imaginer des dribbles, c'est pour ça qu'il n'y en a pas dix comme nous sur le terrain. Aux spectateurs de nous comprendre ou pas. Certains peuvent toujours dire que Neymar, par exemple, perd trop le ballon, mais sur une inspiration, il réalise un truc incroyable et tout le stade se dresse et applaudit. On est ce genre de joueurs. Je peux aussi me contenter de passes latérales et n'avoir, ainsi, aucun déchet. Mais ce n'est pas ma vision de mon sport. Le football, c'est pour moi la percussion, le spectacle, les buts…

 

D'où vous vient cette aisance technique ?

 

Je ne suis pas passé par un centre de formation. Tout petit, j'ai appris ça dans la rue, où j'ai répété inlassablement mes gammes en Côte d'Ivoire. Ça m'a permis de façonner mon style, d'avoir une façon de jouer bien à moi. Il n'y a rien de calculé dans mon jeu.

 

Comment avez-vous réagi en apprenant la pratique du fichage ethnique au PSG ?

 

Je n'ai pas été, à proprement parler, surpris. Mais je n'ai rien à ajouter là-dessus. Ça ne me concerne pas.

 

En mai 2015, l'ancien monégasque Emmanuel Adebayor avait posté sur sa page Facebook un témoignage où il expliquait avoir été dépouillé par sa famille. Ce sont des procédés habituels en Afrique ?

 

J'y ai aussi été confronté et ça n'est pas, je crois, propre à l'Afrique. On doit se protéger, car c'est le fait de gens très proches. Il faut savoir couper les ponts avec ces êtres nuisibles, même si ça n'est, parfois, pas simple de prendre une décision aussi radicale. On doit penser d'abord à soi, à sa femme et à ses enfants afin d'assurer leur avenir. Vous savez, on ne reste pas footballeur éternellement. Si durant sa carrière, on ne fait pas la part des choses en se laissant abuser par des personnes avides, on s'expose ensuite à une reconversion compliquée.

 

Enfant, vous avez vécu une histoire difficile avec votre père. Que s'est-il passé quand vous viviez avec lui en Côte d'Ivoire ?

 

Il ne voulait pas que je touche au ballon dans la rue au risque, selon lui, de faire de mauvaises rencontres et de tomber plus tard dans la délinquance. Il voulait que je me concentre sur les études. Chaque fois que je jouais, qu'il me voyait jouer ou qu'il apprenait que j'avais joué, je passais à la casserole…

 

C'est-à-dire ?

 

Il me tapait sur les doigts, me punissait dans ma chambre. Parfois, quand je revenais du foot, mon père me battait avec une petite ceinture, mais je ne pouvais rien y faire. C'était plus fort que moi. Je devais retourner jouer, même en sachant qu'en rentrant chez moi je pouvais encore me faire taper bien comme il faut… Ça m'a forgé une personnalité. Ça m'a surtout appris, très jeune, à prendre des décisions, à savoir ce que je voulais. Là, je comprenais que j'étais prêt à mourir pour le foot et que rien ne me détournerait de ma passion.

 

Votre persévérance a donc eu raison des réticences paternelles ?

 

Ça ne s'est pas passé comme ça. À l'âge de 9 ans, ma mère m'a fait venir à Paris pour vivre avec elle. L'école était très importante à ses yeux, mais elle m'encourageait parallèlement à faire du football (NDLR. Il a joué à Championnet Sports, un club du XVIIIe arrondissement de Paris). Elle m'a acheté mes premiers crampons. C'était une libération.

 

Avez-vous conservé des relations avec votre père ?

 

Oui. Il est d'ailleurs très fier de ma réussite. J'en reparle avec lui et il me dit : Oui, mais c'était pour ton bien… Je ne voulais pas que tu tournes mal. Après, je peux comprendre, mais je crois qu'il faut laisser un enfant vivre sa passion. Dieu avait tracé mon chemin dans le foot.

 

Vous avez trois enfants. Votre douloureuse expérience personnelle a-t-elle fait de vous un papa gâteau, prévenant et aimant ?

 

Il faut quand même mettre un cadre. Mais à un certain moment, quand des parents forcent leurs enfants à faire ce qu'eux pensent bien, ce n'est pas toujours opportun. J'ai deux garçons. J'aimerais qu'un, au moins, devienne footballeur. Ils n'ont pas le choix, de toute façon, ils doivent assurer ma retraite (il éclate de rire). Après s'ils se destinent à autre chose, c'est bien aussi.

 

Propos recueillis par Harold Marchetti

Interview publié le 02 décembre 2019

D'où provient l'info

  • Source : Le Parisien
  • Mis en ligne par :
  • Date de publication :
  • Dernière mise à jour : Dim, 19 Avr 2020 à 15h 42
  • Contacter l'auteur : news@mondialsport.net

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